jeudi 15 mars 2012

Marguerite Duras

         ..." quand j'écris, j'ai le sentiment d'être dans l'extrême déconcentration, je ne me possède plus du tout, je suis moi-même une passoire, j'ai la tête trouée. Je ne peux m'expliquer ce que j'écris que comme ça, parce qu'il y a des choses que je ne reconnais pas, dans ce que j'écris. Donc elles me viennent bien d'ailleurs, je ne suis pas seule à écrire quand j'écris. Mais ça je le sais. La prétention, c'est de croire qu'on est seul devant sa feuille alors que tout vous arrive de tous les côtés. Evidemment, les temps sont différents, ça vous arrive de plus ou moins loin, ça vous arrive de vous, ça vous arrive d'un autre, peu importe, ça vous arrive de l'extérieur.
Ce qui vous arrive dessus dans l'écrit, c'est sans doute tout simplement la masse du vécu, si on peut dire, tout simplement... Mais, cette masse du vécu, non inventoriée, non rationalisée, est dans une sorte de désordre originel. On est hanté par son vécu. Il faut le laisser faire." ..."C'est un mot qui n'est pas beau, le vécu, mais je ne vois pas par quel autre mot le remplacer..."
       Extrait de Les lieux de Marguerite Duras, entretiens de Michelle Porte avec Marguerite Duras (mai 1976) paru dans la Collection "double" aux Editions de Minuit.




                                                       

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